Jean Jacques Audubon, un peintre d’oiseaux sans âmes, devenu défenseur de la nature ?
12/06/2024
Ce texte était trop long pour être inséré dans le chapitre « Portraits d’animaux » de l’article sur « La figuration des animaux en régime naturaliste : de la brute au Memento animalis es ». Aussi l’en ai-je extrait. Il constitue une sorte de zoom sur la question des figurations scientifiques d’animaux, établi à partir de l’œuvre étonnante d’un peintre aventurier, ornithologue, autodidacte, porteur d’un projet encyclopédique de description des oiseaux d’Amérique.
Jean-Jacques Audubon est né en 1785 dans la colonie française de Saint Domingue (Haïti aujourd’hui). Il sera élevé en France par sa belle-mère, près de Nantes. A 18 ans, pour échapper à la conscription napoléonienne, il migre aux Etats-Unis dont il obtiendra la nationalité en 1812. Passionné par le monde des oiseaux de l’Amérique du nord alors encore sauvage, beaucoup plus diversifié que celui qu’il a connu en Europe, il formera très tôt le projet d’en identifier et peindre toutes les espèces afin de publier l’ensemble dans un ouvrage. Dans des conditions épiques, il consacrera sa vie à ce projet qu’il mènera à terme avec la publication de Birds of America, une édition géante de 435 planches et d’Ornithological Biographies composé de 5 volumes de textes.
Peindre les oiseaux dans leur environnement
Les quelques planches ci-dessous sont extraits de Birds of America.
Le petit Chevalier à pattes jaunes est un oiseau limicole. Il fréquente les côtes et, à l’intérieur des terres, les zones humides. Marais, tourbières, rivages, lagunes, prairies humides sont les milieux dans lesquels il vient chercher sa nourriture : de petits invertébrés enfouis dans la vase comme les arénicoles, ou vivant en surface comme des insectes, des larves, des mollusques ou des crustacés. Il est ici représenté près d’un étang forestier dans la région de Charleston, en Caroline du sud [1].
Dans ses premiers tableaux, Audubon plaçait ses oiseaux et les plantes sur un fond blanc d’où ils se détachaient, puis alors qu’il avait réalisé la moitié de ses planches, il prit l’habitude de les intégrer dans un véritable paysage comme on le voit dans cet exemple et le suivant.
Les courlis à long bec sont des échassiers qui vivent le long des côtes Atlantiques. On voit d’ailleurs au loin se profiler la cité portuaire de Charleston telle qu’on pouvait l’observer au début du XIX° siècle. Pour peindre cet arrière-plan, il se fit aider par George Lehman, un artiste Suisse, qui l’accompagna dans certaines de ses expéditions [2].
Ces oiseaux trouvent leur nourriture en la repérant par la vue ou en fouillant la terre avec leur bec. Ils se nourrissent d'insectes, mais mangent aussi des crustacés dans les régions côtières.
Le double talent, artistique et scientifique, d’Audubon ne fait pas de doute : il dépeint avec précision les espèces qu’il observe et il les insère avec élégance dans leur environnement. Ce faisant, il innovait par rapport à ses prédécesseurs qui se contentaient de reproduire des spécimens empaillés, figés sur un socle, comme dans L’histoire naturelle des oiseaux de Buffon [3], parue juste avant la révolution française.
La différence saute aux yeux. Elle n’est pas due qu’à la différence, évidente, de virtuosité des illustrateurs. Le socle est certes escamoté, remplacé par un support plus naturel, mais l’artifice est bien insuffisant : cette Huppe n’est manifestement là que pour exhiber les traits caractéristiques de son espèce ; elle apparait sur l’image pour ce qu’elle est, morte.
Audubon, lui, s’intéressait à l’écologie des oiseaux, c'est-à-dire aux interactions qu’ils entretiennent avec leur milieu naturel. On le voit de manière encore plus claire dans la scène de prédation ci-dessous, toute en mouvement.
Ici, on voit un rapace, une Buse à épaulettes rousses, se jeter sur une compagnie de Colins de Virginie qui s’envolent pour échapper à ses serres. Toutefois, cette scène est une construction improbable car ces cailles, pour échapper à leurs prédateurs, ne s’installent pas sur des terrains dégagés, mais couverts. Elles se disposent en cercle, la queue au centre, et si un importun vient malgré tout à les repérer, elles s’enfuient chacune de leur côté [4]. Ici, le peintre a fait le choix de la lisibilité au détriment de la véracité.
Pour mener à bien son projet scientifique, Audubon a pris d’entrée de jeu la décision d’une représentation grandeur nature des oiseaux. Lorsqu’ils sont petits, ils sont donc un peu perdus dans la feuille, et lorsqu’ils ont de longs cous et de longues pattes comme ce Héron ou le Flamant rose, il leur incline la tête vers le sol, ce qui leur permet de tenir dans le format d’édition. Cela tombe bien car le grand Héron est un chasseur patient. Il se tient immobile dans des eaux peu profondes et attend qu’une grenouille ou un poisson passe à proximité pour s’en saisir instantanément d’un coup de bec.
Cet engoulevent est un oiseau nocturne qui doit son nom de « bois-pourri » à son chant roulé de 3 syllabes, répétées en boucle. Il se nourrit d’insectes volants capturés en vol. Trois d’entre eux sont ici peints au milieu de feuilles de chênes qui les dissimulent dans la journée et au côté de papillons de nuit, des Saturnides, dont ils se nourrissent. C’est une belle composition qui a donc une valeur documentaire en quelque sorte enrichie.
Un témoin des ravages causés par la « conquête de l’Ouest »
« Le vol de cet oiseau [le Pic à bec d’ivoire] est d’une grâce extrême (…). Il passe d’un arbre à l’autre (…) d’une seule volée en glissant (…) selon une courbe élégante. Toute la beauté du plumage apparait à cet instant et remplit de joie le spectateur » écrit Jean Jacques Audubon. « Il y a très peu d’instants dans la journée où on ne les entend et cette circonstance favorise la destruction de l’espèce, causée (…) en raison de sa beauté et parce que le riche scalp attaché à la mandibule supérieure fait un bel ornement pour les parures de guerre (…) de nos indiens ou pour la poche à poudre de nos pionniers et chasseurs. Tous tirent cet oiseau principalement à cet effet » [5]. Mais si le Pic à bec d’ivoire a prospéré dans les vastes forêts sauvages d’Amérique du nord tant qu’elles étaient le seul terrain de chasse des indiens, tout a changé avec l’arrivée des trappeurs et des pionniers européens. En moins de cent ans, le déboisement et des armes de plus en plus efficaces ont assuré la disparition de l’espèce.
Le cas du Pigeon migrateur est encore plus impressionnant. Au début du XIX° siècle, c’était probablement l’espèce avienne la plus abondante du monde. En 1813, au Kentucky, Audubon observe un vol ininterrompu de pigeons. Il veut les compter et estimera à plus d’un milliard le nombre d’individus passés au dessus de Louisville ! Des spécialistes en ont estimé la population à plusieurs milliards rien que dans l’Ohio, le Kentucky et l’Indiana. Ils furent abattus par milliers alors qu’ils nichaient sur leurs dortoirs et expédiés dans les grandes villes où ils pourrissaient sur les trottoirs s’ils ne trouvaient pas d’acheteurs. Le dernier pigeon migrateur mourut au zoo de Cincinnati en 1914 [6].
Des 489 espèces d’oiseaux qu’Audubon a peintes pour Birds of America, aujourd’hui 7 ont disparu, une dizaine d’autres est en voie d’extinction, 90 sont sérieusement menacées et 210 en déclin caractérisé [7].
Jean Jacques Audubon était un tireur d’élite et il a, lui aussi, abattu beaucoup d’oiseaux, au-delà de ce qui lui était nécessaire pour se nourrir ou disposer de modèles pour ses tableaux. « Il prétendit même que s’il ne tuait pas une centaine d’oiseaux, sa journée était mauvaise » [8]. Mais il est arrivé dans une Amérique où la nature était encore largement inviolée. Il ne pouvait pas imaginer, à ce moment là, que des chasses de plus en plus efficaces et massives conjointement à la disparition des niches écologiques du fait des mises en culture, allaient conduire à l’extinction ou la raréfaction des populations aviennes. Il s’en rendit compte toutefois plus tardivement et s’insurgea par exemple contre les massacres de bisons [9]. Sa vie durant toutefois, il fut d’abord un observateur admirateur de la vie animale, au point d’y consacrer la sienne et déplorer leur disparition quand il s’en aperçut.
Rompre le silence des images ?
De ces portraits d’oiseaux, quel enseignement tirer sur leur intériorité ?
On pourrait d’abord relever qu’ils ont l’air bien vivant et donc espérer, contrairement à ce qui se passe avec les natures mortes [10] ou les reproductions d’espèces momifiées, pouvoir repérer des indices qui les privent de subjectivité ou au contraire leur en accorde ? Mais en fait, ils n’ont que l’air vivant car pour pouvoir peindre avec précision ces volatils, Audubon se faisait d’abord chasseur. Il les abattait au fusil, puis il glissait aussitôt dans leur corps, avant qu’ils ne se rigidifient, des fils de fer pour leur redonner les postures qu’ils adoptaient quand ils étaient encore vivants. Mais au fond peu importe la méthode adoptée car les peintres sont de toute façon nécessairement des illusionnistes.
Contrairement à Dürer qui n’avait jamais vu de rhinocéros et en fit une brute épaisse (voir « Portraits d’animaux » dans La figuration des animaux en régime naturaliste : de la brute au Memento animalis es), Audubon connaissait bien les oiseaux qu’il peignait. Il ne cessait de les observer dans leur vie et il en admirait la beauté et l’élégance. Ses portraits sont précis, détaillés, mais ils sont aussi trop parfaits d’une certaine manière. Lorsqu’il les peint en groupe, les individus se ressemblent car ce sont les traits d’espèce qu’il veut restituer. Ce n’est que lorsqu’il les met en scène qu’une vibration singulière leur semble donnée. C’est le cas par exemple du Pigeon migrateur femelle qui plonge son bec dans la gorge du mâle pour saisir la nourriture qu’il lui a apporté, ou bien de la Buse à épaulettes lorsqu’elle se jette sur les cailles. Mais, si on compare ces œuvres avec les Canards sauvages de Chu Ta (voir La peinture chinoise des lettrés ou comment célébrer l’harmonie de l’homme avec la nature), la différence apparaît manifeste. Ce que Chu Ta cherche à saisir ce ne sont pas les caractéristiques de l’espèce, mais un dialogue entre des individus qui apparaissent chacun dans des actions qui leur sont propres, individualisées.
J’avais à l’époque, commenté ainsi cette œuvre : « Cette scène pleine de vie est aussi dans un certain sens, très parlante. Un maître canard s’approche en vol plané de ses compagnons et a l’air de les admonester, comme s’il leur reprochait de trainer sur une berge alors qu’il leur reste tant de chemin à parcourir dans leur migration automnale. Pendant que l’un d’entre eux le regarde, peut-être muet d’étonnement, un autre semble lui répondre. Une élégante graminée aux angles brisés les sépare comme pour manifester leur distance ou leur désaccord ». Je ne savais alors évidemment pas que ce texte se trouverait si adapté au sujet que j’explore aujourd’hui.
Mais, ainsi que le souligne Philippe Descola, il n’y a pas que l’analyse des images qui permette d’identifier le régime ontologique qui les sous-tende ; il y a aussi le contexte de leur production et l’usage qui en est fait : « Un régime figuratif ne se laisse pas seulement définir par les types d’objet et de relation qu’il choisit de rendre visible ni par les seuls outils formels qu’il emploie pour ce faire ; il est aussi particularisé par les circonstances et les lieux où les images sont montrées, par le rôle qu’on leur fait jouer, ou non, dans un collectif, par le réseau qui les accueille, et surtout par les moyens retenus pour déclencher le genre de puissance d’agir dont on les crédite » [11]. Cela suppose de ne pas s’arrêter aux seules images, mais de remonter à leur genèse, aux motivations de celui qui les a produit, et plus encore à leur destinée sociale, une fois produites.
Le triple pouvoir d’agir des images d’Audubon
Ce qu’il en est, sous cet angle de l’œuvre de Jean-Jacques Audubon est très bien documenté. Le pouvoir d’agir qu’on accorde encore aujourd’hui à ses images ressort de trois registres : scientifique, esthétique et politique.
Le premier d’entre eux est le plus évident. Se manifeste en effet dans Birds of America, la volonté encyclopédique de recenser toutes les espèces d’Amérique du Nord et dans chacune de ses images, une volonté de fidélité descriptive. Audubon s’est inscrit dans la démarche et la logique classificatrice structurée par Linné au XVIII° siècle : rendre visible les traits caractéristiques d’une classe, ici celle des oiseaux vivant dans un espace géographique particulier, et de chacune des espèces qui la constitue. Il fut en outre un des premiers ornithologues à utiliser le marquage des animaux pour suivre leurs migrations. Son projet était explicitement scientifique. D’ailleurs, lorsqu’il se rendit en Europe afin de recueillir des souscriptions permettant d’éditer son ouvrage, il vint à Paris présenter ses peintures à Georges Cuvier, le grand naturaliste de l’époque. Celui-ci l’invita à l’Académie des sciences dont il était le Secrétaire. Les membres présents, unanimes, firent l’éloge de son travail : « il n’est point d’ouvrage qui surpasse celui que monsieur Audubon publie sur les oiseaux de l’Amérique septentrionale » [12]. Cette reconnaissance scientifique subsiste jusqu’à nos jours puisque son œuvre sert toujours de référence pour la connaissance zoologique d’une Amérique du nord encore largement inviolée par la colonisation européenne.
Quant à l’ambition esthétique, Audubon l’a porté dès le départ et avec la même force que son projet scientifique. Ils étaient dans son esprit indissociable. Sa valeur ne trouva toutefois pour lui de traduction économique qu’à l’automne de sa vie. Pour entreprendre sa grande œuvre, il abandonna les affaires et, entre ses expéditions, exerça de multiples métiers : taxidermiste, portraitiste, professeur de dessin, de danse de musique [13]… Ce n’est qu’après la publication de Birds of America et les ventes qu’il en fit à partir de 1827 ainsi qu’aux conférences qu’il donnait, une fois devenu célèbre, qu’il atteignît une certaine aisance qui lui permit de se faire construire une maison près de New York où, devenant progressivement aveugle, il se retira.
Aujourd’hui, il subsisterait, dispersés dans le monde chez des particuliers ou des institutions publiques [14], environ trois quart des 200 exemplaires de l’édition géante originale [15]. Vendu 1000 $ à l’époque, le prix de l’édition originale grand format n’a ensuite cessé d’augmenter, entrant dans l’âpreté spéculative d’amateurs et de collectionneurs : en 1920, il fallait débourser 2500 $, en 1940 12000 $, en 1977 400 000 $ et en 2010 11,4 millions $ ! [16]
Le pouvoir d’agir politique de son œuvre ne lui a été conféré que bien après sa mort. S’il en avait eu connaissance, il en aurait été le premier étonné. Il ne fut en effet jamais un militant de la cause animale, mais plutôt un observateur qui appréciait la beauté et l’élégance des oiseaux et voulait en immortaliser les traits. A la fin du XIX° siècle toutefois, pour des raisons qui dépendent autant du contexte de l’époque qu’à son œuvre et son histoire de vie, il devint le symbole des défenseurs de la nature. Ainsi en 1886, 35 ans après son décès, était fondé à New York la première « Audubon Society », une association de conservation et de protection des oiseaux. Ces sociétés se sont ensuite multipliées sur le territoire étatsunien et la « National Audubon Society » vint les fédérer en 1905. Elle est aujourd’hui une des plus importantes Association nord américaine de protection de la nature et d’éducation environnementale.
Le pouvoir d’agir des images ne dépend pas d’elles-mêmes, ni de la volonté de leur auteur. il est accordé par la société en fonction des sensibilités, des idéologies, des représentations qui sont les siennes. Audubon poursuivait un projet scientifique et artistique, mais pas un projet politique ou écologique, même si sur le tard, il a pris conscience des atteintes à la vie sauvage. Qu’importe. Le pouvoir d’agir de son œuvre, plus facile à identifier et à documenter qu’une analyse de ses images confirme que sa production picturale relève bien du champ de ce que Philippe Descola appelle l’ontologie naturaliste.
[1] Source : Jean Jacques Audubon, Le grand livre des oiseaux, Edition Citadelles et Mazenod, Préface de Jean Dorst, textes de Roger Peterson, Paris, 1989
[2] Ibidem
[3] L’Histoire naturelle des oiseaux est illustrée de 973 planches d’oiseaux intercalées au texte. Ces planches ont été réalisées entre 1760 et 1779, gravées sur cuivre d’après les dessins de François-Nicolas Martinet et aquarellées à la main (source : Musée Ménard à Lunel dans l’Hérault, qui en possède un exemplaire en 10 volumes)
[4] Ibidem
[5] Henri Gourdin et Alain Joveniaux, Les oiseaux disparus d’Amérique dans l’œuvre de Jean Jacques Audubon, Editions de la Martinière, Paris, 2008, pages 53 et suivantes
[6] Source : Le grand livre des oiseaux
[7] Henri Gourdin et Alain Joveniaux, Les oiseaux disparus d’Amérique dans l’œuvre de Jean Jacques Audubon, Editions de la Martinière, Paris, 2008, page 9
[8] Le grand livre des oiseaux. Introduction de Roger Peterson et Virginia Marie Peterson
[9] Source : Le grand livre des oiseaux, préface de Jean Dorst
[10] Voir « La vie coite » dans La figuration des animaux en régime naturaliste : de la brute au Memento animalis es
[11] Philippe Descola, Les formes du visible. Une anthropologie de la figuration, Editions du Seuil, Paris, 2021, p 82
[12] Source : Le grand livre des oiseaux
[13] Source : Le grand livre des oiseaux, préface de Jean Dorst
[14] Il en resterait 94 aux Etats-Unis, 17 au Royaume Uni, le reste étant réparti dans 12 pays. En France, on en trouve des exemplaires notamment à la Bibliothèque Nationale et au Musée National d’Histoire Naturelle. Source : Le grand livre des oiseaux, introduction de Roger Tory Peterson et Virginia Marie Peterson.
[15] Deux éditions furent produites du vivant d’Audubon : une édition grand format (96 cm sur 66 cm), dite aussi « édition d’abonnement » qui fut gravée à l’aquatinte par l’Anglais Robert Havell et dont les planches furent diffusées par abonnement à partir de 1827, puis une édition « Royal octavo », d’un format plus réduit et moins onéreuse, diffusée à partir de 1840.
[16] Source : Le grand livre des oiseaux, introduction de Roger Tory Peterson et Virginia Marie Peterson. Pour 2010, vente Sotheby à Londres
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